Résister et choisir sa vie

Bonjour,

Le confinement, encore ! Voilà donc la réponse de notre gouvernement à l’épidémie qui touche essentiellement les personnes les plus âgées. J’écoutais hier encore les paroles de mon père, médecin, 95 ans : « C’est idiot. Arrêter tout le monde pour éviter que des vieux meurent alors qu’ils mourront de toutes façons dans un an ou deux. S’ils meurent aujourd’hui, qu’est ce que ça peut faire ? »

Je ne vais pas revenir sur la gestion de la crise — que je critique depuis le début. Mais je vais revenir sur ce terrain essentiel de l’organisation de nos vies.
Car les mesures qui sont prises viennent la mettre à mal.

En effet le message des autorités est grosso-modo le suivant :

« Nous allons supprimer toutes les occasions de contamination sauf le travail et, en même temps, les mesures que nous prenons vont entraîner pour beaucoup d’entre vous la disparition d’une grande partie du travail et de l’activité. A ceux là nous imposons donc une diminution importante de revenus que nous ne comblerons pas... Et pour tous et pour un temps indéterminé nous allons contrôler vos relations sociales. Vous n’êtes plus maîtres de vos déplacements ni des relations que vous allez entretenir. Vous n’aurez ni réunions, ni fêtes, ni restaurant, ni pratiques sportives ou artistiques collectives... »

De notre côté nous pensons que la « casse du service public » organisée depuis trente ans au nom d’une logique gestionnaire de diminution drastique des coûts est la cause majeure de l’encombrement actuel des services de soin. Et non pas un virus, la COVID-19, qui fait, sommes toutes, partie des aléas sanitaires pour lesquels nous avons organisé notre système. Pour nous la solution pérenne n’est donc pas le confinement mais la restauration décidée et organisée de ces services publiques et l’abandon de cette logique purement comptable imbécile. Or cette perspective est totalement absente tant des discours de nos dirigeants que de leurs actes...
Nous ne pouvons donc adhérer sans réticences à l’objectif affiché — sauver des vies — pour justifier la mise en place de ce cirque incroyable qu’est le confinement. Suivre les consignes gouvernementales devient un non-sens, voire un vrai contre-sens...

Ce qui guette alors tous ceux qui, comme nous, sont critiques face à ces mesures, c’est l’obligation d’obéir à des consignes que nous jugeons absurdes. Nous sommes alors plongés dans une absence de sens. Absence qui fait croître le sentiment d’impuissance et peut nous pousser à la dépression.

Le problème qui se présente à nous — de façon plus aiguë encore qu’en mars — consiste donc à transformer cet ensemble de contraintes imposées en opportunités choisies. C’est à dire à transformer la diminution de l’activité travaillée (et des revenus) en temps disponible que nous pouvons maintenant, grâce à cette nouvelle organisation que nous allons mettre en place, investir dans des activités que nous avions dû jusque là délaisser.
Et si nos revenus baissent et que nous ne pouvons payer nos charges, il nous faut accepter de ne pas être les seuls responsables de nos dettes et ne pas consacrer tout notre temps à essayer de les payer. C’est une modification du rapport au collectif qui débute...

Choisir sa vie...

Mais faisons attention. Sommes nous capables d’un tel effort de remodelage de notre emploi du temps et de nos vies pour qu’il ne dure à nouveau que quelques mois ?
Si nous mobilisons nos ressources pour que nos vies restent vivables, c’est à dire pleine de sens, il est alors bien possible que l’organisation que chacun de nous aura trouvé ne se résorbera pas facilement ni sans douleur avec le retour des beaux jours et la disparition du virus... La reprise de l’activité risque de soulever autant de problème qu’est en train d’entraîner sa réduction.
Il est possible que nous entrions alors dans une bifurcation sociale qui pourrait avoir des conséquences majeures.

Posté le 31 octobre 2020 par Vincent Béja